mardi 18 mars 2008

Cher Ray Zo,


Journal :

Après un combat lent et sans attraits, j'ai vaincu le mauvais génie d'I-tunes, et réussi à lui faire comprendre qui commande dans ce lecteur de MP3, namé.

Je pourrai donc lui faire avaler des nouveautés bientôt, ce qui me manquait bien.

Tu connais mp3fiesta.com ?

C'est pas gratuit. Mais c'est tellement pas cher que la question de la légalité se pose un peu. Ca résout momentanément mon dilemme personnel, à savoir prendre gratos c'est pas très juste, être une vache à lait quand j'en ai pas les moyens, c'est pareil.


Drift :

Je serai partant pour une surtaxe mensuelle ajoutée à mon abonnement internet. Avec surtaxe sur l'année suivante si, pris de fringale, je téléchargeais plus de 100 titres par mois… Et les artistes seraient réellement rétribués en fonction des téléchargements. Ca me ferait mal que l'argent que j'emploie à télécharger les fatals picards aille à Céline Dion, par exemple. Or c'est ce qui arrive avec la taxe sur les supports vierges, hein. Même quand les CD servent à graver des photos du petit dernier, il y a de l'argent qui va à Celine Dion, et aux artistes que la SACEM a estimé comme étant écoutés par les copieurs d'albums. Les chiffres de départ sont les disques les plus vendus.

La répartition par probabilité de la copie est "juste". Je donne un peu pour les gens qui vont copier du Johnny, mais eux donnent un tout petit peu pour Didier Super, même s'ils en ont jamais entendu parler. Mais dès l'ors qu'on peut tracer mes téléchargements ? Mon forfait est global pour ma consommation d'immatériel, mais la recette tirée des forfaits est distribuable avec précision.

Le piratage c'est mal. J'aimerai bien penser que c'est comme du braconnage, sauf que non. C'est plus comme détourner une source : même si moi je n'en bois que 3 gorgées, mon détournement continuera à profiter à d'autres buveurs, et la quantité qui échappe au propriétaire du terrain de la source est pratiquement inquantifiable.

Mais le téléchargement, c'est un peu comme si on avait inventé des canadairs personnels, qui iraient chopper la flotte au besoin, à la source pour nous la rapporter direct dans la bouche. Le problème du propriétaire, c'est qu'il avait tellement pris l'habitude de nous taxer l'eau en nous faisant payer l'accès à ses fontaines à lui qu'il a mis du temps à accepter que le système de distribution changeait.

Mon raisonnement à moi - tu t'en fous probablement mais si ça me fait plaisir de gamberger qu'est-ce que t'y peux - c'est que les proprios de sources payent depuis un peu moins de 10 ans les presque 40 ans où ils ont tiré profit de leur monopole des fontaines. Je me demande comment pencherait la balance si on mettait face aux pertes grandissantes les profits faits du temps d'avant les canadairs.

Les libéralistes, et je soupçonne les patrons et actionnaires des majors d'en être, pensent que le marché s'autorégule, parce que l'offre et la demande doivent correspondre. On nous l'a fait entrer dans le crâne : c'est à nous, comme travailleurs, de correspondre à la demande de travail, à faire la meilleure offre sur le marché, être moins payés que les plombiers polonais pour être sûr d'être payé tout court. Ca marche donc aussi comme ça dans l'autre sens et faut que les majors se fassent à l'idée : tant que l'offre de la gratuité sera plus intéressante que la leur, ils pourront faire légiférer l'Etat tant qu'ils veulent (tiens donc, on a besoin de l'Etat maintenant, j'avais mal compris le fonctionnement de l'économie alors ?), on ira prendre là où c'est plus facile. Même si on envoie les hélicos à certains pirates, et qu'ils sont mis en taule avec les tueurs en série, ça ne rendra les pirates que plus malins.

La consommation de loisirs est basée sur la séduction, pas sur la répression… Eclate-toi chez moi ou je te tape ! Je crains que cette injonction implicite soit justement ce qui amène à chercher ailleurs.


Journal :

Je te disais il y a quelques semaines avoir eu des sentiments amoureux en rêve.

Il y a une autre expérience dont je me souviens parfois. J'y pense maintenant parce qu'il y a une fille qui a un peu le même genre de visage, dans le hall d'accueil où je suis.

J'ai déjà eu le coup de foudre pour une image. Ca m'est arrivé une fois, plus depuis.

Enfin si, j'ai croisé ensuite une personne qui ressemblait à l'image, et j'ai eu un retour de coup de foudre. Mais comme c'était une passante, une inconnue totale…

Donc ce visage, c'était quelques secondes d'une vidéo qui passait en boucle sur l'écran, dans la vitrine d'un salon de coiffure. Un mannequin, donc. Première et unique fois où j'ai pu éprouver quoi que ce soit pour une beauté froide. Elle n'était vraiment pas mon type.

Elle avait les cheveux courts et bouclés, châtain bronze, une sorte de permanente très dense, presque un buisson. Les yeux bleu norvégienne. Elle avait un air un peu étrange, quelque chose d'hypnotique dans son port de tête, son expression.

Le salon de coiffure était dans une rue voisine de chez moi. Je n'avais pas remarqué la vidéo auparavant. Quand je repassais ensuite devant, j'ai attendu le morceau de la boucle vidéo. Les premières fois, l'émotion est revenue, et puis ça s'est estompé avec le temps.

C'est justement l'intensité de cette émotion qui m'étonne.

J'ai toujours eu des émotions troubles. Puissantes, parce que me travaillant longtemps, mais très rarement fulgurantes. En dehors de la peur, presque rien d'irrépressible.

En amour… c'est ce qui est triste. Mes émotions les plus fortes (qu'on différenciera indulgemment des sentiments, voilà, merci) se sont presque toujours portées sur des figures plus que sur des personnes. C'est-à-dire, comme je le disais, soit des images, soit des rêves, soit des filles de loin. J'avais un vrai cœur de jeune fille au collège. Et puis bon, le premier baiser est arrivé tard, est reparti vite, et mon imaginaire avait déjà eu le temps de devenir pragmatique. Peut-être que j'ai appris à cette époque à refouler les attirances trop fortes.

Mais voilà, les filles de loin, les filles avec qui il ne s'est rien passé, c'est ça que j'ai vécu le plus romantiquement. J'étais pas malheureux. Ca me convenait parfaitement qu'elles restent inconnues ou méconnues. Je pouvais tranquillement me sentir beau au bois dormant, sachant que les princesses fonctionnaient comme moi, préférant les sculptures aux sculpteurs. Sauf qu'elles allaient chauffer les sculptures, ensuite, tandis que moi… je prenais la pose de celui qui regarde en spectateur. Difficile, mais tout à fait confortable.

Je ne voulais pas mieux les connaître. Faire l'amour, se sentir bien, oui, mais pour le cœur, je crois qu'au fond je savais que la vie, la Relation, ce serai jamais aussi bien que l'attente et l'admiration. Je savais que le piédestal sur lequel je mettais les filles était de ma main, que personne de réel ne tiendrait en équilibre là haut.

Au fond, je pense toujours un peu comme ça, sauf que je garde les objets de cristallisation moins longtemps dans mon collimateur.
J'arrive plus ou moins à trouver ce qui, dans la vie, est cristallisable. C'est encore rare, mais j'y arrive. J'ai bon goût, en matière de filles de près.


Tu peux toujours dire que je suis un rêveur. Mais je ne suis pas le seul.

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